2002... Cette BM me plaisait aussi, mais bon...
Tout roule bien. D'avril à juillet, on entretient et on sur-entretient. Vidanges, huilages, nettoyages, fignolages, point d'allumage. Réglage culbuteurs, les 0.15 et 0.20 n'ont pas bougé. En revissant une bougie, je m'aperçois que le filetage ne tient pas trop... On verra ça au retour...
Je m'amuse à ajuster le compteur de vitesse et le compte tours. Carnet à bord, essais autoroutiers, savants calculs et bricolages du ressort des aiguilles entre deux aires de repos.
Un peu de cosmétique, je change le vinyl de l'arceau et je modifie l'assise des sièges pour rester bien calé lors des changements rapides de direction... Je préférerai finalement la version originale, mon dos me fait trop mal pour virer le coussin...
Le copain déprimé m'appelle, il a quelque chose à me montrer, il arrive samedi soir.
Immatriculée dans le 33, la 964 blanche targa entre dans le parking de l'immeuble... Il vient de l'acheter, ça tombe bien, je vais pouvoir ajuster mon compteur et attester que la '14 monte bien à près de 200 sur le plat... Au soir, on poussera la '64 à 250 compteur, dans une facilité et sécurité déconcertantes... Il me laisse la garde de sa grenouille pour la nuit, il ne tient pas à la laisser dans la rue pendant qu'il dormira chez ses parents... Le lendemain, le gars revient, bermuda, polo et casquette blanche, lunettes Police, il vient reprendre son auto et repart à Bordeaux. Je ne reverrai jamais la 964, il la vendra six mois plus tard.
Août. Dans les calmes vignes bourguignonnes étouffant de soleil, explosion. Pas celle d'un bouchon de crémant... Celle d'une bougie qui vient de sauter contre le capot moteur... Problème. En ce temps, je n'embarquais pas encore tout mon matériel d'assistance... Je retrouve la bougie et me brûle les doigts... Demi-tour sur la route des Grands Crus, retour très bruyant sur trois cylindres, vers un petit centre commercial devant lequel j'étais passé quelques kilomètres avant... J'achète quelques outils, je démonte le cache cylindres et revisse la bougie... Problème, ça ne tient pas. Tel David Mann et la durite de radiateur de sa Plymouth Vaillant, je me souviens, dans un flash de stupidité : le filetage de ce puits était déjà malade il y a quelques temps, j'aurais dû arranger ça... Maintenant, c'est trop tard. Deux solutions : retourner vers le Nord ou poursuivre la route de Monaco en jouant à la roulette...
Je coince la bougie comme on fixait jadis les antennes de télévisions sur les toits, du temps où on réglait encore l'image de son poste... : fil de fer sur la porcelaine et haubans que j'accroche en trois points... Je force ainsi la bougie à rester dans son puits, malgré la compression qui cherche à l'éjecter... Sans être discret, je juge passable le niveau sonore de l'auto et continue mon chemin... Après tout, il ne reste plus que 700 bornes... Et le retour.
A l'arrivée, au calme du parking de l'hôtel, je stylise mon haubanage de bougie... Quelques pets selon l'accélération, mais je me promets de rouler tranquille... La talonnée veut visiter la parfumerie Grocanard, forcément... Eze, plein soleil, on se refait le viaduc de la 246 de Danny... Curieux comme beaucoup de monde a la même idée d'aller visiter Gronanar... Pas une place de libre, je tourne et m'énerve, la voiture cale et pétarade. Je remonte vers la corniche pour faire demi-tour, queue de poisson à une Clio blanche. Le type me rattrape en bas de la côte et m'invite à m'arrêter. Il m'indique une place, avec la main droite qui sort du carreau baissé, sympa, je me dis... Le gars sort de sa voiture, pas bon, c'est un municipal très excité... Il se précipite vers moi et arrache les clés, "You're under arrest !". Pas parce que j'étais the best, mais à cause de l'huile qui a moucheté sa vitre et sa chemise blanche lors de ma ré-accélération... C'est un film, mais le gars, colérique, a tout le bras gauche dégueulasse !
"J'appelle l'OPJ pour dresser un PV d'immobilisation du véhicule, émission de fumées nocives et toxiques ! Je n'ai rien contre les collectionneurs, mais bon, là, non !... Vous avez le droit de vous rendre au garage le plus proche, vous êtes sous mesure de rétention de carte grise !".
Bref, le gars m'avise que j'ai le droit de poursuivre le périple en train ou en stop, comme je veux... Je me revois revisser cette bougie qui ne tenait pas, dans un bon garage fermé, proche du frigo à boissons fraîches...
Après des palabres, le type, un gros moustachu, se ramollit un peu mais reste ferme, "Je vous rends les clés, mais pas de carte grise ! Vous roulez à vos risques et périls jusqu'au garage le plus proche et vous faites réparer ! Cette voiture est enregistrée "gelée" et impropre à la conduite ! Vous récupérez la CG contre les preuves de réparations". Bagnole gelée, tu parles, je sue comme un porc et j'ai bien besoin d'un parfum groconar...
Comment pourrais-je laisser la caisse de ma vie à des étrangers du bout de la France ?! No way ! Clé ou pas clé, je n'en ai pas besoin de toute façon puisque je démarre au bouton industriel, la clé n'étant là que pour débloquer le Neiman, que je peux virer assez rapidement, au cas où...
Je reprends l'allemande et file à l'anglaise de ce village puant, sans papier mais en polluant. Et sans voir Gropanar... Bof, malgré ce moment de solitude, je profite largement de ces vacances. Il faut savoir rebondir, comme lors de l'accrochage avec la GS au rond-point... Même si le matelas est trop mou...
Dix jours sans papier et sans se faire repérer... Je m'arrête de temps à autre pour redresser l'électrode de la bougie, écrasée par les explosions aléatoires dans le cylindre...
Déjà que l'épisode Gronibar m'avait fait perdre des points, j'en perds encore au retour, devant l'indécision des talons à franchir la porte de tel ou tel restaurant du centre de Valence... En plus, il fait trop chaud côté passager, parce que le chauffage est en mode forcé permanent. Je m'énerve et, foutu pour foutu, rentre à près de 160 tout le long de l'autoroute... 5h du mat', j'ai des frissons, je claque des dents et je monte le son contre la blonde maniérée...
Je suis surtout embêté par cette carte grise... Je change les guides de soupapes et pose un filetage rapporté dans le puits abîmé de la culasse... J'oubliais, du coup, huitième dépose moteur...
Malgré ça, toujours le panache indien à l'arrière...
Après une neuvième sortie du moteur, il apparaît que le jeu aux segments est énorme, plus d'un millimètre, je comprends mieux le coup de la chemise du flic... Les démontages ne m'impressionnent plus, j'en rigole, j'arrive aux bielles en six heures, sans me presser et avec les moyens du bord...
Je ne tergiverse plus, j'achète simplement un second kit cylindres-pistons neuf et le flat 4 s'ébroue tranquillement quatorze heures plus tard. Bref, très flegmatique, je ne m'en fais plus trop, je maîtrise pleinement. Je commence même à photographier mes exploits... Reste à maîtriser la récupération de la carte grise, toujours rangée dans un tiroir du commissariat de Eze...
Pour conclure l'aspect mécanique de cette affaire, les segments bousillés sont la conséquence annoncée d'une huile trop froide depuis un an et dix mille kilomètres. No comment... Qu'on se le dise...
Quant à l'issue administrative, je récupérerai la carte grise en octobre, par voie postale, non sans une petite diversion avec la facture justifiant les travaux... La Wilde Enterprise ltd, faut dire qu'elle n'existe pas encore...